Depuis 20 ans, la maternelle Jacques Prévert chouchoute les moins de 3 ans

Le dispositif passerelle accueille les enfants de moins de trois ans, qui ne sont pas prêts à quitter les bras de leurs parents et à intégrer la petite section. Il prépare une séparation inévitable. Le 16 mai, l’école Jacques Prévert soufflait les vingt bougies de cette classe un peu particulière.

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Une famille échange avec l'enseignante du dispositif sur la droite. À l'arrière plan, des invités discutent devant les panneaux créés pour l'occasion.

Droits réservés : Arnaud Loubry, Rennes Ville et Métropole.

La classe passerelle a fait sa première rentrée en 2004, quand la scolarisation des tous petits ou « scolarisation précoce » est devenue un sujet. Aujourd’hui, de nombreuses maternelles se sont emparées de l’idée. À Rennes, 14 établissements proposent un « sas » aux enfants et à leurs parents.

Le principe est simple : une vingtaine d’élèves de moins de trois ans sont accueillis au fil de l’eau, tout au long de l’année scolaire. Ils et elles restent jusqu’à la coupure estivale, avant d’effectuer une rentrée classique en septembre.

Grâce à une convention tripartite entre l’Éducation nationale, la CAF (Caisse d’allocation familiale) et la Ville de Rennes, plus de 400 écoliers ont eu la possibilité d’expérimenter ce démarrage en douceur. S’en souviennent-ils ? Et leurs parents ? L’anniversaire est l’occasion de faire un bilan de ce dispositif qui aide les enfants à bien grandir.

Aide au démarrage

Elvire avait « du mal avec la séparation ». Pour elle et pour son fils Roen, l’expérience fut bénéfique : « Ça aide beaucoup les parents. C’était une bonne classe et, franchement, tout le monde était à l’écoute. »

À Jacques Prévert, la classe passerelle accueille les enfants dont les familles n’ont pas eu recours aux modes de garde habituels : crèche ou assistante maternelle. La séparation est alors des plus brutales pour les petits qui n’ont connu que le cocon du foyer.

Parfois les parents, nouveaux arrivants, sont éloignés du système éducatif. Par manque d’information, ils ne sont pas rassurés. Il peut aussi y avoir des obstacles linguistiques importants. L’enseignante et l’éducatrice tissent alors un lien et créent l’indispensable confiance.

Et il y a d’autres cas de figure. Ryan avait du mal à la garderie, on lui a proposé le dispositif. Pari gagné. Jola voulait accompagner sa grande sœur et commencer l’école. Après une transition de 4 mois, elle a intégré la petite section. Une exception impossible aujourd’hui : les classes sont chargées et ne peuvent pas accueillir de camarades supplémentaires en cours d’année.

La directrice de l’école maternelle s’est faite enquêtrice afin de contacter celles et ceux qui sont passées par le dispositif. Les vieux cahiers d’appel ont bien aidé. Mais Sarah Lebreton ne s’est pas arrêtée là : elle a écumé les réseaux sociaux, même Le Bon Coin. Au total, une centaine de familles ont été retrouvées et invitées à célébrer les vingt ans.

Des parents dans l'école

Les activités au sein du dispositif sont les mêmes qu’en petite section : manipulation, comptines, collage, etc. Ce qui change, c’est la présence des parents à l’intérieur de l’établissement. « La classe passerelle, ça accueille l’enfant, mais ça accueille aussi son parent, ses parents même ! », précise Lolita, enseignante dans le dispositif. C’est une sorte de coéducation qui vise à l’autonomie.

L’enfant est accompagné pour sa première journée ou plus, le temps qu’il faut. « Il y a un temps d’adaptation et quand les deux se sentent prêts, on commence la séparation. En général, ça ne dure pas plus de deux semaines parce que les parents sont en confiance et, du coup, les enfants se sentent bien aussi. »

Les pères et mères sont ensuite invités à partager des moments avec leur enfant, comme récemment pour Graines de livres (lien externe). Ils sont aussi conviés à des temps d’échange entre adultes. Autant d’occasions de réfléchir à l’alimentation, aux écrans, au cadre et aux limites, etc. Stéphanie se rappelle des ateliers : « On s’entendait bien. On en connaissait plein qui habitaient à côté. »

En cette fin de journée ensoleillée, ils étaient nombreux à avoir répondu à l’invitation. Des affiches sur la cour figuraient des avants/après d’enfants devenus adolescents ou jeunes adultes, et aussi des liens vers des témoignages à télécharger. À entendre les conversations, il y avait du plaisir à se retrouver et à retrouver la mémoire.

Anne-Claude Jaouen