Trafics de drogue : une vidéo de prévention inédite pour limiter l’implication des jeunes

Comment dissuader les jeunes de s'impliquer dans le trafic de stupéfiants sans porter de jugement ni minimiser la violence de ce phénomène saillant à Rennes ? C'est l'objectif de la campagne de prévention lancée par la Ville. 

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Des acteurs sont attablés et tournent une scène de la campagne de prévention Limits.

Droits réservés : Julien Mignot, Rennes Ville et Métropole

Conçue par l'agence de communication La contrée et un groupe de jeunes rennais, cette campagne se décline en une vidéo et une affiche.

Le programme Limits

Un appartement rennais. Des techniciens et acteurs dans chaque recoin. Du brouhaha et un parquet qui grince. « Silence s'il vous plaît », lance le réalisateur. Tout le monde se fige. « Ça tourne… Et, action ! »

Ce jeudi 15 mai, les locaux de l’agence de communication rennaise La contrée se transforment en plateau de tournage. On y réalise un court-métrage de prévention, porté par la Ville de Rennes et plusieurs partenaires, dans le cadre du programme Limits qui vise à limiter l'implication des mineurs dans les trafics de stupéfiants.

Le scénario : un homme d'une trentaine d'années est attablé avec des proches. Un jeune lui demande : « Et toi, tu faisais quoi quand tu avais notre âge ? » Flashback. Des souvenirs saccadés, des scènes d'ennui comme guetteur ou de bagarres armées comme dealer, s'enchaînent. La vidéo montre l’isolement, la violence et le regret.

Depuis février, cinq jeunes rennais et rennaises travaillent à l’élaboration de cette campagne, qui se décline également en une affiche, avec La contrée et l’association Addictions France. Le message retenu : entre embrouilles, ennui, violence et drames, « Y’a rien à attendre du deal » et « À Rennes, y aura toujours mieux à faire ».

Sensibiliser toutes les jeunesses

Parmi eux, Nadjila Ali Djoumoi. Avec ses camarades, elle répète une scène. En plus d’avoir participé à la création du message, les jeunes le portent derrière les caméras. « Ça va, je crois qu'on a un meilleur acting que Nos petits secrets entre voisins ! », plaisante-t-elle.

En année sabbatique, elle souhaite intégrer un bachelor en communication. Elle a rejoint Limits autant pour l’expérience que pour l’impact du projet. Habitante du quartier du Blosne, elle veut sensibiliser les jeunes générations sur la dangerosité et les impacts du deal dans une vie.

« Avec mes petits frères et sœurs, on vient d'un quartier où il y a du trafic de drogue. Tous les jours, on voit les guetteurs s'ennuyer, on entend les dealers s'embrouiller, et ça fait mal au cœur. »

Nadjila Ali Djoumoi21 ans

Un message loin du discours punitif

Myrhon Barty partage cet engagement. Passionné de vidéo, il a rejoint Limits via la mission locale We Ker et a embarqué avec lui son ami d’enfance, Donovan Desjardin. « J’ai accepté d’accompagner Myrhon car je me sens aussi concerné par le sujet. J'ai des proches qui ont rencontré des problèmes avec la drogue, la consommation, voire le deal. »

Nadjila, Myrhon et Donovan savent combien il est difficile de partager au plus grand nombre ce « sujet aussi sensible » et saillant à Rennes. « D’autant plus que l’entrée des jeunes dans le deal est un phénomène aux réalités sociales complexes et multiples, difficile à appréhender de manière trop binaire, et qui, en plus, fait écho à des enjeux de santé publique », souligne Julie Guyomard, responsable du service Prévention de la Délinquance et Médiation de la Ville de Rennes.

La municipalité et l’équipe de création de la campagne veulent nommer le phénomène sans faire peur ni minimiser la violence. Poser une information juste, sans stigmatiser les jeunes ou juger leur implication, volontaire ou non, dans les trafics.

« On porte un message qui n'est ni culpabilisateur, ni moralisateur. Ce type de discours ne marche pas et alimente le stigmate. On ne parle pas des raisons pour lesquelles les jeunes entrent dans le trafic. Ce qu'on leur dit, c'est : faites attention et ne perdez pas votre temps avec ça. »

Donovan Desjardin19 ans

Porter une autre voie

Dans cette campagne, les jeunes ont tenu à montrer une autre voie. Un QR code en fin de vidéo et sur l’affiche de sensibilisation renvoie vers les pages Jeunesse du site de la Ville de Rennes, où sont recensés les projets positifs portés par et pour les jeunes.

« J'imagine que pour les jeunes impliqués dans les trafics, il est difficile de s'apercevoir que le monde leur réserve des choses merveilleuses. Pourtant, c'est le cas. J'espère qu'ils verront qu'on a mis en avant, pour eux, toutes les initiatives (associations, clubs sportifs, jobs…) qui existent dans leurs quartiers et qui peuvent les aider à s’en sortir. »

Myrhon Barty18 ans

Un plan d’actions pour prévenir l’entrée des jeunes dans les trafics de stupéfiants

La réalisation de la vidéo et de l’affiche de prévention s'inscrit dans le cadre d'un plan d'actions piloté par le service Prévention de la Délinquance et Médiation de la Ville, financé grâce à une subvention de 150 000 € sur trois ans de la Mildeca (Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives).

Ce plan d'actions recouvre cinq volets pour limiter l'entrée des jeunes dans les trafics de drogue : de la formation des professionnels en contact direct avec la jeunesse à la sensibilisation des enfants et de leurs parents, en passant par une étude pour mieux cerner les profils des jeunes impliqués dans le deal ou encore, la campagne de communication.

À Rennes, comme dans d’autres villes de France, la part des jeunes impliqués dans les trafics augmente. « En 2018, environ 80 mineurs étaient mis en cause pour des faits de délinquance liés aux stupéfiants (consommation ou revente). En 2021, on a atteint un pic de plus de 220. Surtout, les acteurs de terrain nous alertent sur des pratiques de recrutement agressives qui instrumentalisent les jeunes précisément parce qu’ils sont mineurs. C’est donc notre responsabilité de les informer, de leur donner les clefs de compréhension qui leur permettront, peut-être, de ne pas se laisser embarquer », conclut Julie Guyomard, responsable du service Prévention de la Délinquance et Médiation de la Ville de Rennes.

Découvrez la vidéo

Vidéo : Y'a rien à attendre du deal

Titre : Y'a rien à attendre du deal

Avertissement : cette vidéo comporte des scènes susceptibles de heurter la sensibilité de certains spectateurs. 

"En vrai, j'ai pas encore eu le stage, mais je pense que ça devrait le faire". 

"Waw c'est chaud". "Oh te décourage pas et passe-moi le sel tiens".

"Moi c'est bon j'ai validé mes choix". "Et toi Math, tu faisais quoi quand tu avais notre âge ?".

"Moi, bah je faisais autre chose". (scènes de deals et de violences). "Mais, il y avait vraiment mieux à faire".

Y'a rien à attendre du deal. À Rennes, il y aura toujours mieux à faire. 

rm.bzh/info-jeunes (lien externe)

Ce film a été réalisé en collaboration avec un groupe de jeunes Rennais et Rennaises dans le cadre d'une campagne de prévention pour limiter l'entrée dans le trafic de stupéfiants. 

Crédits : Limits. Ville de Rennes. Production : La Contrée 2025.