Domaine de Tizé : lieu ouvert

Au bout du plongeoir a fait du Domaine de Tizé un lieu d'art et de partage accessible à tous depuis 2005. Résidences d'artistes ou simple pause, chacun peut y vivre une expérience unique.

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C'est le manoir du domaine de Tizé à Thorigné-Fouillard dans l'agglomération de Rennes (35), l'association Au bout du plongeoir occupe les lieux et organise des événements accessibles au public. On voit le bâtiment en pierre avec une affiche de l'association à droite de la porte d'entrée. Il y a une personne et un chien devant l'entrée. Au fond on aperçoit plusieurs personnes dans le jardin. Derrière le bâtiment, il y a de nombreux arbres. Le ciel est bleu.

Droits réservés : Arnaud Loubry, Rennes Ville et Métropole

Ici, c'est un domaine public, les gens viennent quand ils veulent. Dominique Chrétien, un des fondateurs de l'association, rappelle qu'il n'y a pas besoin d'invitation pour découvrir le site. Il appartient à tous. Contemplatifs, randonneurs ou joggeurs le savent bien : le domaine s'explore librement. D'ailleurs, Il y a toujours quelqu'un à passer.

Il faut dire que le lieu est bucolique. À un jet de pierre de la rue de la Chalotais qui traverse Cesson du sud vers le nord, le domaine est un havre de paix. S'il n'y avait pas le mètre ruban jaune XXL pour nous rappeler qu'ici se trament quelques expérimentations contemporaines, on pourrait s'imaginer avoir voyagé dans le temps.

Dans cette partie de Thorigné-Fouillard, enclavée dans Cesson-Sévigné, les 13 hectares de prairies et de bois du domaine longent la Vilaine. Le bâti attise la curiosité : Il a connu sept siècles de transformation, entre le manoir du 14e et la ferme du 19e, jusqu'à aujourd'hui, explique Mickaël Tanguy, architecte et membre de l'association. Le logis orné de pierre calcaire angevine est séparé des communs par une tour carrée et un petit tunnel. Le manoir a été restauré, mais seulement en partie, alors le charme opère.

La solitude des artistes

On aperçoit par une fenêtre du manoir de Tizé à Thorigné-Fouillard (dans l'agglomération de Rennes), une animation musicale. Au premier plan on voit l'arrière d'un violoncelle, un étui de guitare ouvert, une chaise, des feuilles posées sur un pupitre. Au seconde plan il y a des personnes (adultes et enfants) assises sur des chaises à gauche et à droite. Au troisième plan il y a 4 personnes debouts devant des pupitres qui discutent. A l'arrière plan on voit la fin du manoir et le mètre jaune XXL ainsi que des arbres et une étendue d'herbes.

Droits réservés : Christophe Le Dévéhat, Rennes Ville et Métropole

L'association existait avant même d'investir le manoir. Les artistes souffrent de solitude, voilà pour le postulat de départ. Comme l'explique Dominique Chrétien : Il y a en gros neuf mois dans l'année où on est seul, on n'a pas de place dans les centres culturels, on ne nous invite pas. Si les professionnels ont l'occasion de se rencontrer, un projet artistique naît à l'abri des regards. Il faut attendre la tournée ou la scène pour partager.

La mairie de Thorigné a acheté le domaine en 1978, quand les derniers agriculteurs ont quitté les lieux. Puis, il ne s'est rien passé pendant longtemps. Le manoir est resté muré, par manque de moyens. Lorsque l'association a entendu parler de ce lieu, ça a été comme une évidence. Le dossier a convaincu, et les collectivités publiques ont aidé à l'installation. En 2005, l'aventure a commencé. En 2010, le domaine a été déclaré d'utilité communautaire par Rennes Métropole.

Aujourd'hui, Au bout du plongeoir accueille des artistes tout au long de l'année : des musiciens, des danseurs, des cinéastes, des comédiens, etc. L'équipe se réunit tous les deux mois en assemblées poétiques pour sélectionner les futurs hôtes, pour choisir les artistes de manière intuitive et totalement arbitraire, précise Mickaël Tanguy. Parce que oui, s'il y a des critères, il y a surtout des coups de cœur.

Les artistes passent de 5 à 10 jours en résidence. Des salles de travail leur sont réservées et ils dorment sous la tente s'ils le souhaitent. En l'hiver, quand le manoir est glacial, salariés et artistes invités trouvent d'autres terrains de jeu, parfois en lien avec les projets retenus : le département d'archéoscience de Rennes I, le centre psychiatrique Guillaume Régnier, SII Ouest, etc.

L'équipe de l'association accompagne, soutient et met en lien avec les professionnels. D'ailleurs le jeudi, responsables de lieux culturels, programmateurs ou producteurs sont conviés à découvrir un échantillon des créations en cours. À Tizé, les artistes tentent, ils progressent et avancent jusqu'au bout du plongeoir. Ensuite, ils se lancent.

Ouverture au monde

On voit la terrasse du manoir de Tizé à Thorigné-Fouillard (35) occupé par l'association Au bout du plongeoir. Terrasse ouverte sur l'extérieur avec une partie abritée comprenant des tables et chaises ; une partie sur l'herbe comprenant des tables et chaises et transats. Plusieurs groupes de personnes sont assis.

Droits réservés : Christophe Le Dévéhat, Rennes Ville et Métropole

Pour Dominique Chrétien, ce qui a changé en 20 ans, c’est l’ouverture au monde. Les
artistes savent qu’il y a toujours quelqu’un à passer. S’ils ne veulent pas être dérangés, ils ferment la porte. Sinon, les curieux peuvent jeter un œil, tendre une oreille et, pourquoi pas, discuter. N’importe qui peut venir n’importe quand. Voilà qui est clair.

Les groupes sont également bienvenus : Hier, on a accueilli les personnes âgées de l’EHPAD d’à côté. Elles ont passé l’après-midi ici. Il y a eu un atelier cuisine et elles ont rencontré Thomas Felder, le violoniste en résidence. Des scolaires ont déjà eu l’occasion d’échanger avec Dominique Loucougain, l’apiculteur qui réensauvage les abeilles et récolte le miel au domaine. Pour les collectifs, il vaut mieux appeler avant, pour être sûr de croiser quelqu’un et que la journée se prépare.

Pour celles et ceux qui n'oseraient pas venir sans une bonne raison, il y a l'agenda (lien externe) avec des moments repérables, avec des dates et des horaires. Plusieurs fois par an, des week-ends sont organisés avec un programme varié : atelier, instant artistique, flâneries poétiques, explorations patrimoniales, etc. Sinon, le jeudi, il se passe toujours quelque chose.

Le jeudi, c'est aussi le jour d'ouverture de la Cantine À l'orée du temps. Benoît Gasnier, metteur en scène pendant 28 ans, est désormais aux fourneaux, secondé par les bénévoles d'Au bout de la fourchette. Le repas végétarien terminé, les convives sont libres de faire une sieste, lire, jouer au palet ou discuter avec les artistes présents. Il n'y a ni entre-soi ni obligation. Le seul risque est de rester plus longtemps que prévu.

Anne-Claude Jaouen