Carton plein pour la Grand-Chambre du Parlement de Bretagne

Les Journées européennes du patrimoine 2025 ont permis de découvrir ou redécouvrir la Grand-Chambre du Parlement de Bretagne. Les derniers cartons restaurés ont été installés. Ils font revivre le décor détruit par les flammes en 1994. 

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Des peintures représentants l'histoire de la Bretagne

Droits réservés : Julien Mignot, Rennes Ville et Métropole

Cartons de déménagement, d’invitation, de champagne ? Rien de tout cela. Un carton est aussi une peinture à l’huile sur toile qui sert de modèle à la réalisation d’une tapisserie. Entre la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle, la Grand-Chambre du Parlement est totalement repensée à l’initiative de l’architecte Jean-Marie Laloy. La salle s’enrichit d’une série de tapisseries réalisées par la manufacture des Gobelins.

Les thèmes illustrés sont choisis avec soin. Le Parlement appartient à l’État, mais il est implanté à Rennes. Il faut donc ménager les susceptibilités, raconter l’histoire de la Bretagne des origines ainsi que l’histoire de la Bretagne française : Jules César contre les Vénètes, Le mariage d'Anne de Bretagne, La mort du connétable Duguesclin, etc. Édouard Toudouze est désigné comme cartonnier. C’est à partir de son travail que sont tissées les premières tapisseries. À son décès, Auguste Gorguet prend la relève pour donner l’élan de ce qui deviendra le plus bel ensemble patrimonial de la ville.

Une date marquée au fer rouge

Le 4 février 1994, une manifestation de pêcheurs tourne au vinaigre. Alors que la tension monte avec les CRS, une fusée éclairante lancée par un manifestant se loge dans la charpente du bâtiment historique. Le feu se propage pendant la nuit. Après des heures de lutte, le réveil est difficile : la toiture, une grande partie du deuxième étage et plusieurs salles sont détruites. La Grand-Chambre n’est pas épargnée.

La collaboration nocturne entre pompiers, architectes et conservateurs du patrimoine permet d’évacuer ce qui peut l’être. Les tapisseries sont sauvées in extremis, mais elles sont endommagées par l’eau, la suie et la poussière. Elles sont envoyées pour restauration dans deux ateliers parisiens. Coup du sort, un incendie détruit l’atelier Bobin en 1997 et la moitié des œuvres part en fumée. La Grand-Chambre ne retrouvera jamais son décor originel. 

Lire le récit long sur l'incendie du parlement (lien externe).

En quête de renaissance

Il y a 10 ans, Guillaume Kazerouni, ancien professeur d’art à la manufacture des Gobelins devenu conservateur au Musée des Beaux-Arts de Rennes, part en résistance. Les cartons peints qui ont servi à la réalisation des tapisseries disparues doivent bien être quelque part. Il se met en tête de les retrouver pour les restaurer : ils viendront remplacer les œuvres tissées.

Il aurait sans doute été possible de reproduire les tapisseries. « Pourquoi faire des copies neuves alors que nous avons la chance d’avoir des œuvres originales ? On ne reconstitue rien. Le passé, c’est le passé. Ce qui est détruit est détruit. Il ne faut pas essayer de faire revivre des choses disparues », explique-t-il.

Jean-Baptiste Parlos, premier président de la cour d’appel de Rennes, évoque la quête des tableaux : « Ces cartons avaient été déménagés et plusieurs fois dispersés et se trouvaient, certains roulés dans un coin du musée des beaux-arts, d’autres, pliés en tous sens, à la préfecture de Région, d’autres encore à l’ancienne faculté de Lettres de Rennes ou entassés dans les combles de la Mairie. »

Un travail collectif

Guillaume Kazerouni est tenace. Il parvient à rassembler les cartons et mobilise toutes les énergies nécessaires. « Il nous a fallu 10 ans et 150 à 200 personnes qui ont participé, à plein d’étapes différentes, à l’évolution du projet, qu’on peut appeler collectif. Ils se sont réunis autour de la résurrection de ces tableaux. »

Une équipe de restauratrices s’affaire à nettoyer, effacer les traces de pliages et redonner des couleurs aux modèles peints monumentaux, 5 mètres de hauteur tout de même. Pour mener à bien ce travail titanesque, il faut aussi trouver des financements : le Musée des Beaux-Arts de Rennes, en partenariat avec la Cour d’appel et la Fondation du Patrimoine, met la main au portefeuille. Une levée de fonds auprès de mécènes et de donateurs est indispensable pour mettre un point final à cette décennie épique.

Le 19 septembre, les quatre derniers cartons peints restaurés ont été inaugurés : Jeanne d’Arc et le Connétable de Richemont, Le Combat des Trente, Le Couronnement de Nominoë et La Prédication d’Abélard. La Grand-Chambre a retrouvé son lustre perdu.

La Grand-Chambre et les cartons :  Destination Rennes organise toute l'année des visites du parlement (lien externe)

C'est le premier grand cycle où on raconte un peu en grande pompe comme on aimait le faire au 19e siècle l'histoire de la Bretagne de Jules César jusqu'à Henri I au moment de l'entrée du roi Henri 4 à Rennes. Le Parlement de Bretagne pendant sa restauration dans les années 1890 a bénéficié d'un nouveau décor composé de 20 tapisseries.Et pour faire ces tapisseries, il avait fallu faire avant des tableaux à l'échelle des tapisseries qui allaient servir de modèle qu'on appelle des cartons. Les cartons plus les tapisseries ont été envoyés au fur et à mesure pour un certain nombre. Les tapisseries ont été posées au parlement et puis pour huit des cartons et ils ont été dispersés dans la ville.Les choses sont restées comme ça jusqu'à la seconde guerre mondiale où petit à petit ces tablons ont été enlevés et rangés dans les réserves. Et au final cette histoire a un peu disparue. Histoire qui est assez fondamentale avec le recul. L'exposition qu'on a fait en 2016 a permis de le montrer. C'est ici la plus grande entreprise de la manufacture des gobelins jamais réalisé de l'histoire de la manufacture qui existe quand même que le 17e siècle pour un seul bâtiment. Donc c'est presque 25 années de tissage. C'est énorme. Petit à petit voir le décor intégré ces lieux. Et oui, c'est  émouvant, c'est quelque chose de fort puisqu'on y a participé.C'est un décor qui est assez riche. Donc il y a beaucoup de subtilités. C'était effectivement un chantier de longue durée, de grande ampleur. Il a nécessité donc pour chacun des cartons environ 8 semaines de travail. C'est une grande satisfaction d'abord que ces œuvres soient restaurées et puis ensuite que le public puisse les voir parce qu'elles sont magnifiques ces œuvres et évidemment il y a rien de plus triste quand vous avez des œuvres magnifiques quand personne les regarde.