La Péniche Spectacle : un dernier salut avant de lever l’ancre

Depuis quarante ans, Annie Desmoulin et Hugues Charbonneau font vivre la Péniche Spectacle, théâtre flottant amarré sur la Vilaine. Artistes, passeurs de culture, ils ont transformé un bateau en aventure humaine et poétique. Rencontre à l'heure de larguer les amarres.

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Le soleil caresse la Vilaine, les feuilles des arbres tombent sur les deux péniches amarrées quai Saint-Cyr. Annie Desmoulin et Hugues Charbonneau apparaissent sur le ponton, sourires lumineux : Bienvenue à la Péniche Spectacle, notre transporteur de rêves. Le ton est donné. Annie présente leur petit bijou dans son petit écrin : 70 fauteuils en velours rouge, une scène en lames de bois et, au plafond, une carte imaginaire du tendre où voguent l’anse Boris Vian, la baie Andersen ou le cap Gréco. Ici, c’est petit. Mais tout est un diamant si c’est bien construit , sourit Hugues

Des planches au ponton

Tout commence en 1980, lorsque ce comédien et metteur en scène fonde sa compagnie, Le Théâtre du Pré perché. Après une rencontre avec Bernard Vighetti, créateur des Tombées de la nuit, il joue sur une péniche et trouve sa voie. Il déniche une vieille sablière à fond plat qu’il retape de A à Z : une vraie Ferrari rouge prête à filer sur l’eau !  L'aventure peut commencer, partagée avec Annie, rencontrée dans le milieu théâtral.  Travailler tous les deux, c’est un bonheur. On navigue ensemble depuis tant d’années.  D’abord en charge de l’accueil des artistes, elle devient rapidement l’âme organisatrice du bord : programmation, expositions, médiations, ateliers d’écriture… Ici, il y a toujours quelque chose à inventer, confie-t-elle.

Un art de vivre sur l'eau

Ce qui les anime, c’est le partage. Leur ligne directrice, musiques et voix du monde , ouvre la porte à une programmation pluridisciplinaire. Théâtre, chanson, musique, conte… Les spectacles parlent de tolérance, d’aventure, de vivre ensemble. On a les pieds ancrés et la tête dans les étoiles, résume Hugues. Le bateau devient symbole de voyage intérieur : On a tous un petit bateau dans la tête.

Et la mécanique ? On a notre compagnon de route, Hervé, fidèle depuis trente ans. Et quand ce n’est pas lui, c’est son frère, sourit Annie. Autour d’eux, Juliette, médiatrice, vient compléter l’équipage. Hugues, entre deux spectacles, bichonne ses deux fois quatre-vingts tonnes de métal : lever tôt, chauffage, carénage, soudure à quatre pattes… Si la coque tient, le projet tient, dit-il simplement. Annie, elle, veille à tout : chaque spectateur trouve son nom sur son fauteuil rouge. Un accueil cousu main, empreint d’humanité. Parfois, en hiver, les gens ne veulent plus repartir, sourit-elle. On les comprend : dans cette salle feutrée, l’art entre par la fenêtre et s’installe dans le cœur de ceux qui s’y attardent.

Bon vent

Aujourd’hui, l’heure du départ approche. Annie et Hugues s’apprêtent à quitter le navire avec sérénité : On n’a pas de regrets. On est heureux. Avant de passer la barre à d’autres rêveurs, ils préparent un dernier week-end de partage pour fêter cette longue traversée. Puis, en janvier, le rideau tombera sur un ultime spectacle : Bal à l’entrepont, joué par Hugues aux côtés d’Elsa, musicienne qui, enfant, venait déjà sur la péniche. Ainsi s’achèvera cette traversée poétique qui, quarante ans durant, aura prouvé qu’un bateau pouvait contenir tout un monde.

Un dernier spectacle

Le 16 janvier : Bal à l’entrepont. Chansons métissées et récits sensibles pour le dernier voyage. Plus d'infos sur le site de la péniche spectacle (lien externe)